Transports & trahison: non à l’IN 114!

Transports & trahison: non à l’IN 114!


Les électrices et électeurs genevois voteront le 2 juin sur une initiative pro-bagnole, appuyés par la droite, dite «pour le libre choix du mode de transports» (IN 114).



Les initiants – invoquant la ritournelle: développement durable, écologie, etc. – plaident pour un «équilibre» – en fait le déséquilibre actuel aggravé – entre modes de transport.



Ils veulent injecter dans la Constitution cantonale un titre entier en faveur des transports privés, de la «fluidité» de ceux-ci, pour l’accessibilité du centre-ville à la voiture, etc. mettant en cause l’accent – unilatéral selon eux – de la loi genevoise visant à favoriser les transports publics, malgré son succès tout relatif vu le trafic à Genève, qui voit des dépassements systématiques des normes fédérales en matière de pollution de l’air et par le bruit.



Leur maître mot est «complémentarité», slogan voulant dire qu’ils toléreront les transports publics, mais à la seule condition qu’on ne freine pas le trafic auto privé, présenté comme réponse inéluctable à un «besoin» de mobilité toujours accru, que ces mêmes milieux alimentent par leur propre politique: habitant-e-s parqués à la périphérie, développement de méga-centres commerciaux axés sur les clients en voiture, fermeture des bureaux de postes …qui ne seraient pas dans ce type de complexes, obligation pour les chômeurs/euses d’accepter des emplois au diable vauvert… La liste prendrait des pages!

Cramer vire de bord


Or, en pleine campagne contre l’IN 114, le Conseiller d’Etat «vert» Robert Cramer est intervenu pour apporter sa caution aux arguments de ses partisans …au nom de la remise en route de l’étude de la traversée de la Rade, dont le rejet en 1996, suite à une forte mobilisation sociale, a marqué une nette victoire des partisans des transports publics et l’ultime claque au gouvernement monocolore de droite.



A la différence des couacs précédents de Cramer – concernant le nucléaire par exemple – explicables par une légèreté coupable dans le suivi de dossiers importants, dans ce cas-ci, le magistrat avance froidement les arguments mêmes de la droite. Il l’a fait d’ailleurs devant une association radicale. Ce parti avait fait campagne aux élections, sans succès, avec la traversée de la Rade comme un de ses leitmotiv et s’était vu privé de Conseiller d’Etat. Il peut maintenant s’enorgueillir d’en avoir récupéré un, celui-ci plaide:

  • la fatalité «réaliste» de l’augmentation du trafic, en parallèle avec les transports en commun, plutôt que le transfert indispensable du trafic automobile privé en direction de ces derniers.
  • que la densification des transports en commun exige de construire plus de routes.
  • que la victoire des opposants à la traversée en 1996 s’était faite suite à un débat «peu satisfaisant», celui-ci ayant été …politisé. Il affirme encore que «la circulation n’est pas un sujet de société, c’est un sujet technique»!


Tout le gratin ultralibéral genevois, le radical Pierre Kunz en tête, jubile et congratule le nouveau venu à ses rangs… Cramer persiste et signe en déplorant seulement qu’un journaliste ait relevé ses propos et que la «communication n’ait pas été maîtrisée comme je l’aurais souhaité



Qu’au nom du réalisme, tel élu à un Exécutif se résolve à «accompagner» des positons inverses à celles proclamées lors de son élection est un classique dont la social-démocratie est spécialiste, avec les conséquences que l’on a vues en France. Il est vrai que le cas exrême, rapide et spontané de Robert Cramer est assez unique.



Ce qui est triste enfin, c’est l’incapacité des Verts genevois, tous plus catastrophés les uns que les autres par cette trahison, qui n’ont pas été capables de prendre position pour désavouer collectivement leur magistrat et exiger qu’il se rétracte ou se démette! Une leçon à méditer…



Pierre VANEK